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Oto

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[FR] Oto nait en 1982 de la rencontre de Farid Dahlab, dit Le Faf, et de Pascal Hubert, dit Le Pasc. A cette époque, à Nancy – et encore surement aujourd’hui – tout le monde s’appelle le quelque chose. Il ya par exemple la Corinne, chanteuse des G-String et son mec le Cyril, bassiste et leader du groupe. C’est lui qui en 81 a recruté le Faf et le Pasc aux postes respectifs de batteur et clavier des G-String.
 

Le Faf a 24 ans, il est étudiant. Enfin, ex. Il vient de mettre un terme à sa cinquième année de médecine. Il a déjà une première expérience de la scène puisqu’il a été batteur des FTMM (Flutes et Tambourins du Maroc Mystérieux), un groupe de progressive instrumentale tendance potagère. Le Pasc, lui , a 20 ans, il est étudiant en kiné. Il a longtemps joué de la douze cordes mais il vient d’investir dans un synthé Korg MS 10.
Les répets des G-string sont laborieuses et les engueulades fréquentes au sein du couple dirigeant. Le Pasc et le Faf commencent à se retrouver au local pour des répets à deux. Le concept de duo synthétique est dans l’air, grâce à des formations comme Orchestral Manœuvre in the Dark et, plus près, Kas Product, tête d’affiche du rock nancéen.

L’idée du Pasc et du Faf est de faire un truc en partant de rien et en s’autorisant tout : chacun peut chanter ou se mettre à n’importe quel instrument, même s’il ne sait pas en jouer. Ils laissent délibérément tomber la batterie et se mettent à utiliser la Roland TR 66 Rhythm Arranger, une des premières des boites à rythme.

Le fait de pouvoir s’appuyer sur une ligne rythmique autonome, parfaite et modulable en volume leur ouvre les portes de l’enregistrement et de la composition. Un soir, alors qu’ils enregistrent, ils se font prendre en flagrant délit de dissidence. Ils sont virés de G-String quelques semaines plus tard… mais le Cyril, bon gars au fond, continue à leur accorder la jouissance du local et du matos qui s’y trouve.
Dans les mois qui suivent, ils composent White Fly, Blue Arrow, Anyway, Satisfaction. 4 titres conçus sur le même schéma : Boite à Rythme / le Pasc aux synthés + back vocal / le Faf à la guitare + lead vocal. La voix passe systématiquement par un flanger, qui donne une couleur caractéristique aux premières versions enregistrées en local (cf UnPublished 1).

Leur premier concert a lieu le 25 mai 82 à la salle des fêtes de Vandoeuvre. Pour l’occasion il leur a fallu se trouver un nom. Ils sont tombés d’accord sur Oto parce que c’est facile à retenir, et que ça évoque des choses comme autonomie, autosatisfaction et autocar. Il ya peut être aussi le petit côté germanique qui rappelle Kraftwerk et la consonance avec Devo, deux références incontournables.

A la fin du concert, hommage suprême, les Oto sont félicités par les Kas.
Désormais, rien ne leur semble impossible. Le Pasc, toujours prompt à l’action, programme pour l’été la réalisation d’une maquette, avec l’idée de la présenter à Gérard N’Guyen, dit le Gérard – disquaire branché de son métier, mais aussi découvreur et producteur des Kas Product. Au mois de juillet 82 tout est prêt : le matos a été rapatrié du local dans l’appart du Pasc ; un Revox, qui permettra de faire du re-recording, a été loué pour l’occasion. Ils ont une semaine pour enregistrer.
Les Oto travaillent d’arrache-pied, tard dans la nuit, oubliant parfois de se nourrir. Ils enregistrent sept titres, les quatre existants et trois nouveaux : Bats, Five-Five, et Driving too fast. Parfois, dans l’air du petit matin, ils traversent le pont qui mène à la gare de Nancy, habillés d’un imper beige, d’un marcel et d’un pantalon de treillis : ils vont s’acheter un américain-merguez et une bière.

Les jours fastes, ils se font une entrecôte sauce poivre avec des frites dans un resto qui reste ouvert toute la nuit. Ils sont les rois du monde.
Rendez-vous est pris avec le Gérard, à qui la maquette a été envoyée, et là Bingo! Il a craqué sur le Anyway et il est partant pour produire les Oto.

Mais le ciel se couvre. Le Faf, qui a cédé à la pression familiale, reprend médecine et part en octobre, la mort dans l’âme, occuper un poste d’interne à l’hôpital de Neufchâteau (Vosges). Les Oto ne se retrouvent plus que le week-end. Mais cela ne les empêche pas de répéter et de faire des concerts.
Début 83, ils sont à Poitiers, accompagnés du Gérard pour une séance d’enregistrement dans un seize pistes. Mais la poisse est là : à peine ont-ils commencé à brancher leur matos que le studio se détraque, victime d’une panne mystérieuse. L’enregistrement est reporté. Ils reviennent au printemps, cette fois sans le Gérard. Mais le studio plante à nouveau. Ce deuxième raté leur porte un sérieux coup au moral et refroidit les relations avec le Gérard, soupçonné d’avoir choisi un studio au rabais. La guigne se poursuit : le Pasc, qui n’a pas repris kiné à la dernière rentrée, reçoit une convocation de l’armée et en août, part faire son service militaire. Pour finir, le propriétaire du garage où ils répètent ne renouvelle pas le bail : les Oto n’ont plus de local. Ils n’ont d’ailleurs même plus d’appart à Nancy. 

Mais un de leurs potes, François Rousseau, dit Johnny Ravioli, dit le Ravio, dit le Jo est à la fois à la recherche d’un groupe et de colocs pour son F3. Le Jo, étudiant en médecine le jour et rocker la nuit, a monté, puis quitté les Julie Gangrène, groupe de rock, tendance Pretenders, dont il était le guitariste. Il joue également du sax et de l’harmonica. C’est une vieille connaissance du Faf, et il a croisé Le Pasc à l’occasion d’un bref passage dans les G-String. Après quelques, répets et un ou deux concerts improvisés, le Jo intègre les Oto et les Oto s’installent chez le Jo.
La nouvelle formation s’équipe de la nouvelle boite de Roland, la TR 808 et, au mois de mai 84, enregistre une maquette comprenant Anyway et Bats ainsi qu’ un nouveau morceau, Bad boy, leur première composition à trois.

La chose est proposée au Gérard, qui donne son accord pour distribuer, mais pas pour produire. Qu’à cela ne tienne, chacun va taper sa famille et le montant de la production est finalement réuni. Quelques mois plus tard les Oto sont à Paris, rue de la Madeleine, dans un vrai studio, avec un vrai ingénieur du son. En deux jours, ils enregistrent leurs 3 morceaux, rajoutant au passage des prises de (vraie) batterie pour gonfler le son.
L’album sort au milieu de l’été sur DSA (Les Disques du Soleil et de l’Acier), le label du Gérard, qui assure une promo active. L’accueil est bon : les Oto ont droit à quelques lignes dans Libé, passent plusieurs fois dans des émissions de télé régionales et dans les radios libres qui, à cette époque, poussent comme des champignons.

Automne 84. Le Pasc est de retour du service militaire. Le Faf a terminé ses études de médecine et le Jo a abandonné les siennes, s’enfuyant un beau matin par la fenêtre de l’une des salles de rez-de chaussée du CHU de Brabois, où il effectuait un stage de 5eme année.

Ils ont trouvé un nouveau local et renouvelé leur matériel. Ils se sont notamment équipés d’un synthé Roland SH 101 et d’une Bassline TB-3003, qui peuvent être synchronisés avec la TR 808. Ils se produisent dans la plupart des caves et des salles de concert de Nancy, partageant parfois l’affiche avec les Dick Tracy, avec qui ils feront un concert parisien au Grand Rex. C’est la belle vie.
Les Oto jouissent de leur nouvelle célébrité.
Mais, le temps passant, l’année 85 les trouve plus souvent devant un demi que derrière une guitare.
Le réveil arrive en 86 grâce à Vincent Hachet, dit le Vince. Le Vince, grand écumeur des soirées nancéennes, est avant tout réalisateur (il vient de tourner Chicken-Kitchen, court-métrage primé au festival de Clermont) mais il est également musicien. Il a été le batteur de Matrix, groupe new wave

éphémère et a monté les Geinst Naït, groupe de musique industrielle, avec son compère Thierry Mérigout, dit le Mémé (qui a lui-même signé la pochette du Anyway).
Au printemps 86 donc, le Vince, qui a assisté à la quasi-totalité des concerts des Oto, les presse de se bouger et leur propose de produire leur second album. Quelques mois plus tard, Purge an urge est enregistré dans un studio de la banlieue parisienne avec Bernard Deffond (l’ingénieur du son du premier album), et la participation de la Cécile (Candidate), du Chico et de la Mèche (Dick Tracy).
Reste à trouver un distributeur, car cette fois, le Gérard n’est plus de la partie. Après plusieurs mois de recherche, le Vince et les Oto signent avec Madrigal sur le label Divine.
Mauvaise nouvelle : l’album, qui comporte au départ neuf titres est réduit à six.
La distribution de Purge an urge se passe mal. L’album est quasi introuvable hors des rayons des disquaires de Nancy. Quant à la promotion, elle est inexistante. Le succès qui avait suivi la sortie du Anyway n’est pas au rendez-vous. Les Oto se réveillent avec la gueule de bois.

Après plusieurs mois de sidération et de beuveries nocturnes, ils entreprennent la réalisation d’une troisième maquette. Ils sont maintenant équipés d’un Tascam Portastudio 244, qui leur permet d’enregistrer en 4 pistes au local. Ils enregistrent une nouvelle série de morceaux, Rock alone, Away, Caroline, Sirocco… (cf UnPublished 2) et recommencent les concerts, avec l’aide du Christian (Christian Vincent), qui leur organise une petite tournée en France. Ils sont désormais quatre sur scène, avec l’arrivée de Patrick Bandelier, dit le Pat, à la basse.
Mais les énergies se dispersent. Des forces centrifuges sont à l’œuvre. Les Oto tentent des expériences collectives (notamment avec le Chico, dans les performances hard trash des Schwanz) ou individuelles : le Jo joue dans un groupe de cow boys, les King Cactus ; le Pasc, qui a rencontré celle qui va devenir Catherine Hubert (dit la Gaze) monte avec elle les Double Nelson.

Les répets s’espacent, les rendez-vous manqués s’accumulent.
Au printemps 87, Le Jo et le Faf enregistrent, à deux, un dernier morceau, No More Twist.

C’est la fin de l’aventure, mais le groupe devient culte.

releases

Cover: Oto - Anyway
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